Hassan Makaremi

Psychanalyste Chercheur Artiste

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Rationnel, Irrationnel et Psychanalyse

Epictète, philosophe du 1er siècle de notre ère, s’interroge sur le fondement de la raison de la façon suivante : "pourquoi ne nous fâchons-nous pas si on dit que nous avons mal à la tête, et que nous nous fâchons de ce qu’on dit que nous raisonnons mal, ou que nous choisissons mal ? "

Ce qui dans la vie de tous les jours est rationnel vient tout simplement du lien entre les causes et les effets. Ce qui suppose deux choses :

  • Que l’effet est issu des causes
  • Une définition chronologique du temps, sachant que la conception du temps est variable (par exemple, elle n’est pas la même dans la mythologie et dans l’esprit des enfants).

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Nom du Père

Dans les prières chiites, le concept de "premier des premiers" est souvent utilisé pour signifier "Allah" : le père, tout puissant, créateur, présent partout, symbole de la justice absolue, le père sévère, origine du temps et du lieu. Dans ce contexte, Allah et les autorités religieuses (ses représentants), politiques (roi et autorités administratives) et paternelles sont souvent confondus.

La notion de nom propre émerge en Iran après la première guerre mondiale, en même temps que d'autres notions modernes. Avant cette date, pour les Iraniens, sauf cas exceptionnels, il existait trois façons de distinguer les individus :

  • 1) tel fils ou fille d’untel
  • 2) tel lié à tel endroit
  • 3) tel + un adjectif, comme un surnom

Dans le premier cas, plus une personne prenait d'importance, plus il y avait de noms du père…de père, etc., à tel point que les plus "grands", essayaient de remonter jusqu'à un membre de la famille du prophète et par conséquent jusqu'à Allah (les chiites pensent qu'une première créature créée dans le monde est l'esprit du prophète Mohamed). On retrouve ici la même démarche que celle qui consiste à relier Mohamed à Adam.

Pour les gens venant d’ailleurs, le lieu de naissance prenait la place du père car les gens ne connaissaient pas "le père". Les noms des lieux ont comme origine soit le nom du fondateur du "lieu", soit le nom de la tribu qui y habite, une caractéristique naturelle, comme une couleur ou un événement important et significatif qui aurait eu lieu dans cet endroit.

Dans le cas où un individu, par son caractère particulier, évoquait dans l'esprit du citoyen un adjectif ou un métier rare, le prénom était suivi de cet adjectif.

La formulation peut se faire comme ceci :

Le premier signifiant construit - le nom du père – est le créateur des autres signifiants :

N = (nom de père) ou (nom de lieu de naissance) ou (signifiant caractériel)

- N = NOM DU PERE --> NOM DU PERE .... --> NOM DU PERE

NOM D’UNE TRIBU  NOM DU PERE

N = NOM DE LIEU  NOM D’UN FONDATEUR ...  NOM DU PERE

 NOM D'UN CARACTERE  CARACTERE DE BASE

- N = CARACTERE DE BASE D'UN INDIVIDU CARACTERE DE BASE

En résumé, d'une manière ou d'une autre, le signifiant de base se lie soit au nom du pèrepère, soit à une caractéristique de base qui permet de devenir le père fondateur des signifiants, origine des paroles : "au commencement, il n'était que le verbe", ou "premier des premiers".

Comme le précise Dawud Qaysari, l'une des grandes figures du soufisme du 14ème siècle, "chacun d'entre les êtres du monde est le signe d'un nom divin et vu que chaque nom divin comprend l'essence qui totalise elle aussi tous les noms, ce nom doit contenir lui aussi tous les noms, de même que chaque être d'entre les êtres est lui aussi un monde par lequel il connaît la totalité des noms. Ainsi vu sous ces aspects, les univers sont infinis" (1)

(1)  SHAYEGAN D. La topographie spirituelle de l'Islam Iranien, La Différence, 1990

 

 

 

La transmission des valeurs

(Sur quels fondements ? Par quels acteurs ? Vers quels enjeux ?)

Sommes-nous conscients des valeurs que nous faisons ressortir à travers notre activité ? Si la transmission des valeurs profondes de la société n'est faite que par l'homme, leur fondement dans sa profondeur intime, ne peut venir que de son inconscient.

L'expérience de l'inconscient, en dehors de la connaissance théorique de ce "lieu psychique inconscient" (et non pas non-conscient) avec sa logique propre, enseigne la Tolérance avec un grand T. lorsqu'on accède à la connaissance de ce qui était caché en nous, on peut mieux comprendre les faiblesses, les différences et la richesse des autres.

S'il n'y a pas déjà un fondement de valeurs sûres en nous, c'est alors l'hésitation ou la lâcheté, parce qu'on ne se sent pas "soutenu" par des bases solides et que l'on a peur d'avancer. Savoir que ceci peut arriver à chacun de nous ouvre la porte à la tolérance.

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L’Amour

Avant tout, il est indispensable de préciser quel champ d’intervention définissant l’amour nous allons étudier ici. En un mot, notre intérêt est centralisé sur l’amour dans le champ psychanalytique et plus précisément, l’amour dans les œuvres de Sigmund Freud. Pour définir ce champ, il est possible aussi de définir ce qu’il n’est pas. La définition de l’amour dans les domaines mythologique, littéraire, philosophique, relationnel et pluriculturel, dans les profondeurs historique, religieuse et mystique, malgré tout son intérêt, est trop vaste pour ce travail. Dans l’ensemble de ses œuvres, S. Freud utilise la notion d’amour à plusieurs reprises, à tel point qu’il en définit plusieurs sortes : l’amour sexuel, l’amour pulsion de mort, l’amour de l’humanité, l’amour poétique de l’adolescent, l'amour véritable, l’amour commun sensuel, l’amour du transfert, l’amour partagé, l'amour inhibé.

Comme toujours, il existe un objet de l’amour, et finalement il s’arrête sur l’amour de l’objet.

D’autre part, il parle à plusieurs occasions de l’amour, de la passion, de l’identification et du stade narcissique. Peut-être la phrase clé de son œuvre à ce sujet se trouve-t-elle dans l’«Abrégé de psychanalyse » (1938) (1985 Puf) : « le sein nourricier de sa mère est pour l’enfant le premier objet érotique, l’amour apparaît en s’étayant à la satisfaction du besoin de nourriture. Au début, l’enfant ne différencie certainement pas le sein de son propre corps. C’est parce qu’il s’aperçoit que ce sein lui manque souvent que l’enfant le sépare de son corps, le situe au « dehors » et le considère dès lors, comme un  objet. Un objet chargé d’une partie de l’investissement narcissique primitif et qui se complète par la suite en devenant la personne maternelle. Celle-ci ne se contente pas de nourrir, elle soigne l’enfant et éveille ainsi en lui maintes autres sensations physiques agréables ou désagréables. Grâce aux soins qu’elle lui prodigue, elle devient sa première séductrice. Par ces deux sortes de relations, la mère acquiert une importance unique, incomparable, inaltérable et permanente. Ainsi elle devient pour les deux sens l’objet du premier et du plus puissant des amours, prototype de toutes les relations amoureuses ultérieures ».

D’ores et déjà, dans ce texte, l’amour et son objet, la frontière entre l’intérieur et l’extérieur du corps, l’investissement narcissique primitif, la nourriture et la sensation de faim sont présents. Dans d’autres textes, il précise : "amour et faim sont deux grands besoins". ( Nouvelles conférences d’introduction à la psychanalyse ).

Ce prototype ouvre la voie. S. Freud dans ses Trois essais sur la théorie sexuelle écrit : « Ce n’est pas sans de bonnes raisons que la figure de l’enfant qui tète le sein de sa mère est devenu le modèle de tout rapport amoureux. La découverte de l’objet est à vrai dire une redécouverte ». Au début de son travail, Freud compare même l’amour avec l’hypnose : « l’attitude de l’enfant à l’égard des parents aimés et certaines relations amoureuses où l’abandon de soi est total, rappelle la relation de l’hypnotisé à son hypnotiseur … La conjonction de l’attachement exclusif et de l’obéissance crédule compte généralement parmi les traits caractéristiques de l’amour » (Traitement psychique, 1890).

En se basant sur la notion du principe "libido et pulsion", S. Freud trace le fonctionnement de l’appareil psychique et de l’aspect de « l’état amoureux », de l’identification, de la passion et de leurs différences. Dans l’amour, le sujet "il" s’est abandonné à l’objet car, dans l’identification, le moi s’est enrichi des propriétés de l’objet. Dans « Pour introduire le narcissisme », il précise : « la plus haute phase que peut atteindre la libido d’objet, nous la voyons dans l’état de la passion amoureuse, qui nous apparaît comme un dessaisissement de la personnalité propre, au profit de l’investissement d’objet ». Freud précise que : « dans la passion, l’objet aimé jouit d’une certaine liberté au regard de la critique. » (Psychologie des foules et analyse du moi, 1921).

Ici, momentanément, on abandonne les explications de S. Freud sur la relation avec l’objet de l’amour pour développer la théorie du fonctionnement de l’appareil psychique sur la base du principe "pulsion et libido", dans le schéma ci-dessous :

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Le but de la pulsion est de supprimer la stimulation et donc de satisfaire le besoin qu’elle a créé. Citons quelques exemples : pulsion de moi, pulsion sociale, pulsion sexuelle, pulsion d’agression, pulsion d’emprise (non sexuelle, mais de domination de l’objet par la force), pulsion partielle (partiellement sexuelle et orale), pulsion d’autoconservation (ensemble des besoins liés aux fonctions corporelles comme la faim), pulsion de mort, de vie, de bonheur.

Dans le Vocabulaire de la psychanalyse, de J. Laplanche la libido est définie ainsi : énergie postulée comme substrat des transformations de la pulsion sexuelle quant à l’objet, quant au but, quant à la source de l’excitation sexuelle : libido du moi, libido d'objet, libido narcissique. Ainsi, S. Freud utilise plusieurs principes pour définir les notions d’ambivalence (l’amour et la haine), de plaisir, de constance, de naissance. Tout s’explique de la même façon que dans le fonctionnement d’une pile électrique qui se charge et se décharge dans une résistance: V (libido) = RI (pulsions)

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Les déclarations comme « …après la mise hors circuit de l’Eros, la pulsion de mort a désormais les mains libres pour imposer ses visées », (Le moi et le ça, 1923), ou « les besoins pulsionnels introduisent de nouvelles tensions » ou « se remplir de libido » …confirment notre hypothèse sur le schéma de base du fonctionnement de l’appareil psychique tel qu’il a été imaginé par S. Freud.

Maintenant, prenons la suite des explications de S. Freud : « L’individu en cours de développement qui, pour acquérir un objet d’amour, rassemble en une unité ses pulsions sexuelles travaillant auto-érotiquement, prend d’abord soi-même, son propre corps, comme objet d’amour, avant de passer de celui-ci au choix d’objet d’une personne étrangère… » (Le Président Schreber, 1910).

L'enfant, physiquement, fait partie du corps de sa mère jusqu'à la naissance où il s'en détache. Mais pour lui, cette séparation ne devient effective que lorsqu'il prend conscience que ses manques ou besoins sont remplis par un objet extérieur à lui-même (sa mère). Son inconscient se forme via ses manques en définissant une frontière entre l'intérieur et l'extérieur, ce qui lui permet de mettre en place une image de son corps.

Ainsi cette chaîne de signifiants, dont l'inconscient est le discours, débute par les signifiants de la mère que le sujet conservera toujours.

Si l'enfant est partie intégrante du corps de la mère dès la conception, la mère à son tour devient partie intégrante de l'inconscient de l'enfant.

Avoir conscience de son corps permet de remplacer en tant qu'objet d'amour, le corps de la mère par le corps du sujet (période narcissique).

Pour approfondir davantage la notion d’amour aux yeux de S. Freud, prenons quelques unes de ses citations significatives :

« la surestimation de la femme aimée hérite du fait que chacun n’a eu qu’une mère, et qu’il ne doute pas de l’identité de celle-ci » (La méthode psychanalytique, 1904).

« La passion amoureuse consiste en un débordement de la libido du moi sur l’objet. Elle a la force de supprimer les refoulements et de rétablir les perversions. Elle élève l’objet sexuel au rang d’idéal sexuel. Elle se produit dans le type objectif ou par étayage, ce qui accomplit cette condition déterminante de l’amour idéalisé » (Pour introduire le narcissisme, 1914).

On peut aussi aimer par substitution à la satisfaction narcissique impossible : « … ce qui possède la qualité éminente qui manque au moi pour atteindre l’idéal, est aimé ; c’est ce qui se produit souvent dans la cure » (Pour introduire le narcissisme, 1914).

« Quiconque tient la sexualité pour quelque chose qui couvre de honte et qui rabaisse la nature humaine est bien libre de se servir des expressions plus distinguées d’Eros. Le mot grec Eros n’est, tout compte fait, rien d’autre que la traduction de notre mot allemand : liebe / amour » (Psychologie des foules et analyse du moi, 1921).

« Lorsque l’objet à l’origine d’une notion de désir s’est perdu à la suite d’un refoulement, il est fréquemment représenté par une série infinie d’objets substitutifs, dont aucun ne suffit pleinement. Voilà qui nous expliquerait l’inconstance dans le choix d’objet, la « faim d’excitation » qui caractérise si fréquemment la vie amoureuse des adultes » (Sur le plus général des rabaissements de la vie amoureuse, 1912).

Dans le même alinéa au sujet de l’objet « a » cause du désir, J. Lacan insiste sur le fait que son accès échoue en permanence et que le sujet psychotique a son objet « a » dans sa poche. S. Freud parle d’état amoureux comme prototype normal des psychoses (1912-1913). Entre un sujet névrosé qui remplace son objet d’origine par une série d'objets substitutifs, un sujet pervers qui le remplace par des objets inanimés et un sujet psychotique avec son objet dans sa poche, on retrouve le sujet analysé qui a atteint son objectif :  l’amour sans objet. (Nestor-A Braunstein, La Jouissance, un concept Lacanien, 2005).

Le thème d’amour avec un lien direct avec le corps du sujet, son image de l’inconscient et ses frontières intérieure/extérieure (différence avec le corps de la mère), la nourriture et le plaisir de vivre (le sein maternel) avec toute son importance dans la vie quotidienne, la cure (transfert) et ses différentes modélisations (libido, pulsion et principe de plaisir de S. Freud, jouissance et objet « a » de J. Lacan ) peut bien être à notre avis résumé par la conclusion de Diane Chauvelot (Psychiatre et Psychanalyste) dans son livre sur le coma 47 jours hors la vie hors la mort. Le coma, un voyage dans l’inconscient :

« Et c’est peut-être ce qui frappe le plus celui qui revient d’une vie dans le coma : c’est que là-bas, tout était vrai, bien au-delà du vraisemblable. Or, au retour, il est difficile d’abandonner tout ce vrai … en tout cas il est d’emblée nécessaire de faire semblant, sinon vous serez taxé de fou … si on revit on est tout de suite obligé de refaire semblant, mais on garde en soi la nostalgie de cette autre vie que personne n’a partagée avec vous, cette vie diminuée de semblant ».

« Que reste-t-il de ce séjour dans ce monde différent, si généreux en souvenirs ? Il n’en reste que le sentiment d’une tranche de vie privilégiée ».

«  Cette longue période de coma a été vécue comme une incarcération non pas en cellule, mais dans un espace sans limite et hors du temps »

«  Y-a-t-il eu seulement un phénomène d’agonie, c’est-à-dire d’une capacité de symboliser des informations. Il semble que les informations n’aient été reçues que par l’inconscient ».

« Chacun des noms, constitué par ces chaînes signifiantes personnelles, est seul évidemment dans un lieu à désigner d’un terme plus animal : son territoire. L’animal cerne son territoire en délimitant ses frontières par ses urines : nous, nous le faisons par des mots. Mais celui qui vit une aventure imprévue dans le coma, il se perçoit dans un autre monde, mais pas dans un lieu étranger. Avec ses signifiants personnels, il est bien ailleurs, mais il reste toujours dans son territoire… Seule exception, transitoire à l’invariabilité du territoire propre : l’état amoureux ».

« L’état amoureux est un changement global de territoire. Les références habituelles sont privées, tout est neuf, tout est beau, tout est plein de promesses : C’est l’énamoration ».

« Rien d’étonnant donc à ce que l’amour ait été considéré comme aliénant. L’état amoureux impose à chacun, jusque-là bien au chaud dans son territoire propre, … Si l’autre vous aime, il vous prend dans son territoire. Ses limites deviennent les vôtres, ses références deviennent les vôtres ».

« Paradoxalement, celui qui est épris n’a de cesse de quitter son territoire propre pour se faire admettre dans le territoire de l’aimé ».

Pour conclure, voyons quelques avancées rapides sur les "mathèmes". Prenons A comme ensemble de signifiants (A = S1, … Sn, , X). Ici S1, S2, Sn sont des signifiants, X signifie "Tous" et  signifie "rien".

Le sujet inconscient ($) à la recherche d'un objet d'amour (a) perdu à jamais, n'en trouvant pas dans cet ensemble A, se rapproche de Tout (X) ou de Rien (), union-fusion ou disparition.
Cette image d'union-fusion (2 esprits dans le même corps) se retrouve dans toutes les littératures du monde. Si cette union est poussée à l'extrême, le sujet se "dissout" dans l'objet d'amour et devient lui-même "Rien".

La relation entre les différents types de structures, A et (a) peut schématiquement être résumée ainsi :

  • Structure obsessionnelle : « a » vacille entre deux signifiants Si et Sj
  • Structure perverse : « a » est un signifiant (objet inanimé) dont la jouissance est possible
  • Structure psychotique : ne cherche pas « a », il ne lui manque pas.
  • Pour les autistes : le « A » manque
  • Pour la démence mentale : le A est déformé

Si aimer, d’après J. Lacan, c’est donner ce qu’on n’a pas, ce manque « baladeur » nous fait chercher soit des signifiants bien déterminés (sujet obsessionnel) soit n’importe quel signifiant que l’on trouve sur son chemin(le sujet hystérique).

Bibliographie

  • BÖRNE, L'art de devenir un écrivain original en trois jours
  • BRAUNSTEIN Nestor-A., La Jouissance, un concept Lacanien, 2005
  • CHAUVELOT Diane, 47 jours hors la vie hors la mort. Le coma, un voyage dans l’inconscient, 1995
  • CHAUVELOT Diane, L'hystérie vous salue bien, 1995
  • DOR Joël, L'apport Freudien
  • FOURTON Jean René, " Freud et Börne", Littoral, n° 2, 1981
  • FREUD Sigmund, Traitement psychique, 1890
  • FREUD Sigmund, L'inconscient en métapsychologie,
  • FREUD Sigmund, La naissance de la psychanalyse, Lettres à Wilhelm Flies, 1887 - 1902
  • FREUD Sigmund, L'interprétation des rêves, 1900
  • FREUD Sigmund, Cinq psychanalyses, 1909
  • FREUD Sigmund, Psychologie des foules et analyse du moi, 1921
  • FREUD Sigmund, Freud présenté par lui-même, 1925
  • FREUD Sigmund, Le moi et le ça, 1923
  • FREUD Sigmund, Le Président Schreber, 1910
  • FREUD Sigmund, La méthode psychanalytique, 1904
  • FREUD Sigmund, Pour introduire le narcissisme, 1914
  • FREUD Sigmund, Sur le plus général des rabaissements de la vie amoureuse, 1912
  • FREUD Sigmund, Nouvelles conférences d'introduction à la psychanalyse, 1933
  • LAPLANCHE Jean, Vocabulaire de la psychanalyse, 1967
  • MALEK, Dictionnaire des symboles musulmans, 2001

Psychanalyse et Croyance

Psychanalyse, Psychanalyste et laïcité

Je cite Lacan : « Freud ne demande pas plus au psychanalyste que la foi dans l'existence de l'inconscient (soit le savoir qu’implique son discours) et non la purification de son pouvoir. La foi y dépend d'une initiation, la psychanalyse, qui met en acte l'inconscient, l'objective en le déliant du corps. Cette séparation du Symbolique et du Corps éprouvée dans le Réel est ouverte à tout sujet du langage puisque rien que la parole y compte. Cette ouverture de l'être aux plus démunis, aux névrosés sinon aux fous, cette croyance à l'existence de l'inconscient est encore une initiation mais cet accès au discours de la science par quiconque opère une synthèse nouvelle du savoir et de l'universel.

N'est-ce pas, chez Freud, charité que d'avoir permis à la misère des êtres parlants de se dire qu'il y a - puisqu'il y a l'inconscient - quelque chose qui transcende, qui transcende vraiment, et qui n'est rien d'autre que ce qu'elle habite, cette espèce, à savoir le langage? N'est-ce pas, oui, charité que de lui annoncer cette nouvelle que dans ce qui est sa vie quotidienne, elle a avec le langage un support de plus de raison qu'il n'en pouvait paraître, et que, de la sagesse…il y a déjà là ?» (Lacan Encore 88)

Je retiens trois éléments phares de ce discours : la foi du psychanalyste, la place du langage et l’apparition de la sagesse, à tel point que ce triangle donne corps à la pratique analytique.

Mes premiers contacts avec les psychanalystes croyants n’étaient pas faciles, car étant profondément laïque, et issu de formation psychanalytique et marqué par le principe de laïcité par son inventeur et ses successeurs, je n’arrivais pas à trouver une issue convenable. Cependant, je trouvais leurs comportements sains et leurs pratiques à la hauteur des psychanalystes athées. Ce paradoxe a été résolu au moment où j’ai constaté dans mes propres pratiques à quel point les croyances du psychanalyste restent en dehors des parenthèses du divan et du fauteuil. Ici, j’essaie de refaire mon cheminement pour mieux clarifier ce constat : la psychanalyse , dans son existence, ne peut s’exercer que par le sujet laïque qu’est le psychanalyste.

De même, l’anthropologie qui, en étudiant les différentes structures sociales des êtres parlants , de la plus ancienne à nos jours et sur la totalité du globe, essaie de trouver certains points communs, est elle aussi profondément laïque, car il n’y a pas de valeurs de base prédéfinies. La psychanalyse, sur ce point aussi marche dans la même direction et ce depuis Freud, qui ouvre le champ de ses investigations aux premiers hommes et développe sa théorie sur les totems et tabous, l’animal sacrificiel, le Dieu juste et bienveillant de nature, qui est la plus noble sublimation de notre complexe parental, père primitif, lien entre péché originel, sentiment de culpabilité, Dieu-Père. Il montre que le Dieu et le diable ont pour modèle primitif le père. Ses études le conduisent à l’antropologie. Freud à plusieurs reprises définit l’origine de la religion fondée sur la vérité historique et il la compare à la vérité matérielle et à la vérité réelle.

Étymologiquement définie comme la «science de l'homme», l'anthropologie contemporaine a des origines intellectuelles, des inspirations idéologiques et des contraintes pragmatiques très anciennes. Ses objets sont d'une grande diversité: la culture, les structures sociales, les éléments stables et les changements des sociétés humaines, leurs rapports avec l'environnement naturel. Elle se définit désormais comme la science des diversités culturelles et sociales et, de façon générale, comme science de l’homme en société. Donc, le projet de l’anthropologie est d’articuler les rapports du local et du global, de penser l’autre et le même dans leurs aspects les plus divers .

La laïcité est une affaire d’être parlant, l’enfant d’homo sapiens – sapiens : il n’y a pas de différence entre peuples dans sa conception. Le respect de la vie de cet enfant dans la cité, depuis plus de 40000 ans et sur l’ensemble de notre terre, définit bien la profondeur de cette laïcité. En effet, les différences, sociales, culturelles, de langues, de modes de vie, de croyances,.. pour les homo sapiens - sapiens, n’existaient pas. Comme dit le poète persan du quatorzième siècle, Saadi :

Les êtres humains sont des organes de même corps car ils ont été créés de la même essence.

L’objet d’étude de la psychanalyse est aussi l’être parlant. Celui qui parle forme son inconscient. L'inconscient est structuré et il obéit à une règle de formation et fonctionnement précis, sujet de l’étude psychanalytique. La formation et le fonctionnement de cet inconscient sont fondés sur le désir du sujet parlant et le trésor de signifiants.

Constatant que les conditions de base d’exercice de la laïcité et de la psychanalyse convergent dès les premiers jours de l’humanité, la psychanalyse ne peut être que laïque. Je cite Freud : “ La psychanalyse ne soutient aucune conception du monde, aucune conception de la vie bonne, ce qui la rapproche assez singulièrement de l’état laïc, … tout en demeurant un système de pensée en rapport avec l’universel”. La psychanalyse donne au sujet une autre écoute de soi et de l’autre : la tolérance…

Anecdote : Une psychanalyste en fin de carrière, dans un séminaire, au moment de la discussion au sujet de «  la chose  freudienne », du «  fantasme originaire » et de «  ce qui fait que l’homme parle » prend la parole et commente le sujet en appuyant sur le besoin d’un enfant de cette chose pour parler et avoir le signifiant. Elle enchaîne sur sa situation, je cite : « même si j’ai dit et répété toute une vie que l’homme inventait le Dieu, parce qu’il avait besoin de quelque chose pour se tenir, aujourd’hui, je me demande si je ne suis pas comme cet enfant qui a besoin de quelque chose,.. Par exemple le Dieu ».

Je vous invite à faire un voyage rapide dans les concepts du fondement de la théorie psychanalytique, la laïcité, et à voir ensuite l’effet de cette théorie sur la pratique et finalement quelques analyses de discours des psychanalystes hommes de la foi.

L'inconscient et la Croyance

Dans sa correspondance avec le pasteur Pfister, Freud dit : “ En soi, la psychanalyse n’est pas plus religieuse qu’irréligieuse. C’est un instrument sans parti dont peuvent user religieux et laïques, pourvu que ce soit uniquement au service de la délivrance d’êtres souffrants ». Freud a longuement questionné la croyance religieuse. Il a même espéré que la vision scientifique du monde qu’il lui opposait serait susceptible de rendre inutile« l’illusion de la religion ».

Quels étaient les arguments de Freud vis-à-vis du besoin de croire en général, et de la croyance religieuse en particulier ? Pour Freud, la croyance religieuse relève de l’illusion. Freud entend par là une représentation qui n’est pas nécessairement erronée, mais qui renonce à être confirmée par la réalité, c’est-à-dire qui se situe, pour le croyant, au-delà de cette confirmation. Aussi, la critique de Freud ne consiste-t-elle pas à démontrer l’inanité de la religion mais à en déceler les motivations inconscientes. Car la force de l’illusion – qui lui permet de se passer de la confirmation par la réalité – lui vient du désir irrépressible qu’elle réalise en fantasme. Pour Freud, ce désir qui forme la représentation de Dieu renvoie fondamentalement à la déréliction de l’homme, elle-même liée à sa prématuration biologique qui rend l’homme longuement dépendant des soins maternels. Du coup, tout en dénonçant la religion comme une illusion, Freud n’a cessé, entre les lignes, de souligner la présence impérieuse du besoin de croire qu’il identifie au besoin d’être protégé par le Père, du moins dans les religions monothéistes. En tant que théoricien, depuis Totem et Tabou en 1911 jusqu’à L’Homme Moïse en 1938, il a toujours eu présent à l’esprit le sujet de la religion. Des textes majeurs comme Malaise dans la civilisation ou L’Avenir d’une illusion en témoignent. Ce thème traverse en fait sa réflexion sur la culture et les phénomènes collectifs.

Le mot grec laïkos signifie «peuple» par opposition à clericos, qui désigne «celui qui détient un pouvoir religieux» (et par extension, politique ou économique). Difficile à cerner avec précision, la notion de laïcité renvoie le plus communément en Occident à une situation où les citoyens et l'État sont indépendants des églises. Elle désigne avant tout un régime juridique et politique de séparation entre l'État et les religions et de neutralité religieuse de l'État.

Ainsi, le niveau le plus ancien comporte cette idée d’une laïcité conçue comme cadre de coexistence apaisée entre plusieurs religions, plusieurs philosophies, plusieurs cultures. Ce cadre apparaît comme neutre. Ainsi, la laïcité peut se résumer à trois valeurs : la liberté de conscience, l’accueil de l’autre et la tolérance.

A son tour, la psychanalyse aide à l’établissement de la laïcité dans la cité, car elle classe par la structure de la psyché et non par un autre critère comme la pauvreté ou la richesse matérielle…

Pratique psychanalytique et Laïcité

On définit le désir du psychanalyste: «  Ce qui peut soutenir le psychanalyste dans son opération, éventuel support de pulsion ou fantasmatique de son acte , c’est qu’il n’agit pas en fonction d’un idéal à partir d’une représentation d’une nature de l’homme ou d’une hypothétique pulsion de guérir, qu’il se dégage de l’emprise du fantasme, et qu’ il est moins dépendant de cet Autre dont, dans le fantasme, chacun se fait l’objet ». Donc, on peut dire : l’analyste doit s’en tenir à une certaine neutralité, il ne dirige pas l’analysant, il dirige la cure, ce qui signifie faire lire le livre de l’analysant par l’analysant lui-même car il existe des endroits mal formés, des symboles mal agencés autour de traumatismes. Comme dit Lacan : “ le psychanalyste, support du transfert, comme sujet supposé savoir, se réduit, au terme du proccesus à être le tenant lieu de l’objet a , un objet destiné à être rejeté, qui n’est pas un concept, ni un signifiant”. Seminaire JL 67-68 Acte psychanalytique.

En ce qui concerne le psychanalyste, la bonne question peut être l’interrogation sur la fonction et la place du psychanalyste. Il est, d’une part directeur de la cure de l’analysant et, d’autre part sujet supposé savoir, ou autrement dit, structure d’un inconscient déjà analysé et sensible à l’interprétation.

La cure analytique pour chaque sujet est unique, un chemin individuel et particulier. Ses signifiants sont à lui, ses désirs, ses rêves et bien entendu, les éléments de ses interprétations aussi. Ce sujet d’interprétation de rêve, basé sur des idées latentes, se distingue profondément des interprétations basées sur les éléments religieux et culturels, sociaux et autres. Il n’y a pas un inconscient collectif, il n’y a pas de rêves collectifs et il n’y a pas de projets de cures collectifs.

La laïcité, comme l’inconscient,  ne donne pas de sens à la vie: ils sont profondément hors idéologie et croyance. Sigmund Freud, dans ses écrits techniques, précise que finalement le psychanalyste ne travaille qu’avec son propre inconscient. La croyance du psychanalyste n’a de place ni dans la méthode avec laquelle il conduit la cure ni dans ses interprétations, car ses interprétations sont liées aux signifiants de l’analysant et non pas à ses propres signifiants d’analyste.

Dans la cure, c’est le psychanalyste qui entre dans le monde de l’analysant et essaie de refaire l’environnement psychique de l’analysant et non pas l’inverse. A ce moment-là, il n’y a pas effet de croyance de l’analyste vers l’analysant car l’analyste prête son inconscient et il ne fait pas la suggestion qui empêcherait la transparence de l’inconscient du sujet analysant.

Une psychanalyse tient son efficience de la relation qui s'établit en dehors de tout rapport d'autorité entre le psychanalyste et l'analysant. Une psychanalyse consiste effectivement à accueillir une personne là où elle en est de sa vie pour l'accompagner pour le bout de chemin qu'elle voudra et pourra faire en compagnie du psychanalyste.

Si l'analysant sait rarement ce qu'il vient chercher, le psychanalyste, lui, a une idée derrière la tête. Il sait, de par sa propre expérience d'analysant, et son expérience plus ou moins longue de psychanalyste, que si l'analysant parvient à fabriquer une pensée de lui-même, une sorte de "savoir" sur lui-même, "savoir" sur ce qui le détermine, c'est-à-dire son histoire et celle de ses ascendants (au sens large du terme), cela va produire des effets.

L'analysant ne peut pas ne pas sentir, à un moment ou à un autre du déroulement du travail, que l'analyste attend de lui, et pour lui, la production de cette pensée, de cette forme de "savoir", de cette "vérité" subjective. Cette attente, sans présomption des formes de changement que cela peut induire chez l'analysant, est un des moteurs du processus.

Le cœur de ce processus se situe dans les moments d'émergence d'une forme de "vérité" constituant l'analysant comme le produit de son histoire. L'analysant fabrique du sens, un sens reconstruit, imaginé.

La pratique de la psychanalyse consiste en une écoute qui vise à la reconnaissance des déterminations inconscientes régissant les choix, les conduites aussi bien que les modes de penser d'un sujet. Qu'il s'agisse de lapsus, d'actes manqués, de rêves et de symptômes témoignant de ce qui a été refoulé ou qu'il s'agisse de délires et autres symptômes traduisant le rejet de la réalité, ce sont autant de manifestations de l'inconscient défini par Freud.

Dans les mises en scène où il est représenté, le sujet ne se reconnaît pas. S'il est propre à l'homme de produire des énoncés qui fomentent du sens en réponse aux questions essentielles de son existence, il n'est aucune réponse, comme aucune représentation, dans lesquelles le sujet puisse se définir.

Le caractère conflictuel de la vie psychique apparaît de façon manifeste, dès lors que l'exigence radicale de ne mettre aucune limite à la parole, qui est au principe de la situation analytique, se heurte aux forces conservatrices, dites de résistance, sans cesse à l'œuvre chez l'individu et son entourage. Ce qui ne peut être remémoré tend à se répéter et les actualisations dans le transfert en permettent l'interprétation.

L'interprétation psychanalytique implique que l'analyste reconnaisse et accepte la place que l'analysant lui désigne, mais sans s'y laisser assigner. Ce qu'on appelle souvent contre-transfert est l'effet sur l'analyste de cette imputation du patient. Par son propre travail psychique et par son expérience, l'analyste se met en position d'y répondre par un acte de parole, qui a pour effet l'émergence de certaines connexions et fixations inconscientes du désir.

La position de l'analyste se caractérise au moyen de deux notions freudiennes également fondamentales : d'une part, la nécessité de suspension du jugement, qui va de pair avec la non-réponse (et qu'on appelle parfois "neutralité bienveillante") ; d'autre part, la règle dite d'abstinence ou du "non agir", qui engage à parler là où le mouvement spontané porterait à "faire". Etant donné qu'ils conditionnent la mise en œuvre de la règle fondamentale, ces deux principes, auxquels il convient de joindre le respect du secret, appartiennent à la déontologie de l'analyste.

Le travail analytique est soumis à une temporalité qui est celle de l'élaboration psychique. Il appartient au psychanalyste de respecter cette temporalité et d'en tenir compte dans la conduite de la cure.

Analyse des discours de quelques prêtres psychanalystes

1-Tony ANATRELLA :

Tony Anatrella est psychanalyste et spécialiste en psychiatrie sociale. Il est également prêtre. Derniers ouvrages parus : « Entre adultes et adolescents : chronique au fil des jours » (Le Cerf, 1997) ; « la Différence interdite » (Flammarion, 1998).

Je le cite : « C’est sur un terrain préparé par l’anthropologie et la spiritualité chrétienne que Freud a pu forger des concepts et une méthode visant à rendre compte des processus inconscients. » . Il croit au processus de l’inconscient. Un   exemple de religieux qui a la foi en la présence de l’inconscient mais il pense que c’est la pensée chrétienne qui a donné à Freud…… : c’est un compromis mais l’essentiel est qu’il croit à la présence de l’inconscient .

Je cite à nouveau :« Lorsqu’on veut opérer un travail d’investigation méthodique, les logiques psychiques sont reconnues pour elles-mêmes et se distinguent de celles de la vie morale et de la vie religieuse. Mais il revient au sujet, et à une conception anthropologique de l’existence qu’il se donne, de faire son unité à partir du psychologique, du moral, du religieux, du social et du politique. Dans le tout - psychologique qui domine actuellement, la psychanalyse risque d’apparaître comme une « religion » du psychisme humain, alors que, étant une technique psychothérapique et une somme de connaissances sur la psychologie humaine, elle n’a pas la prétention de donner un sens à l’existence. Sans perspectives anthropologiques qui nourrissent la psychologie humaine, celle-ci tournerait à vide dans la haine et la violence, et la psychanalyse ne serait d’aucun secours ; la psychanalyse à elle seule ne peut pas humaniser. »

On constate que même un prêtre psychanalyste fait référence à l’anthropologie pour trouver le point de cohabitation entre la religion et la psychanalyse.

2-Père Duigou :

A propos de l'interview donnée par le Père Duigou au magazine "l'Actualité des religions" du mois de février 2001

Je cite : "…. pour moi la vie est un séminaire. Je suis devenu journaliste, analyste et je continue ces deux activités. C'est ma façon de chercher à mieux comprendre et mieux participer à l'aventure humaine. Pour mieux dire et mieux annoncer Dieu, ce qui est la mission du prêtre. Mais vers quarante et quelques années, je me suis quand même dit :

« C'est vrai que le cumul des fonctions de journaliste, psychanalyste et prêtre n'est guère courant. ….Ce fut la première marche à ma formation d'analyste. Mais dans le fait d'être journaliste, psychanalyste ou prêtre, il faut d'abord voir en moi un croyant. C'est-à-dire quelqu'un qui croit en la vie, qui l'aime et qui veut la vivre à fond.»

« En tant qu'analyste, je crois que la cure conduit l'analysant à une guérison. Comme prêtre, je crois que le Dieu de la Bible, qui est un Dieu caché, interpelle l'individu dans les événements de sa vie, en l'appelant à vivre dans son histoire, l'histoire de la libération de l'homme.»

Freud en parlant du but de la psychanalyse, disait que "la guérison vient de surcroît."

Je cite Freud : "Les idées religieuses, qui professent d'être des dogmes, ne sont pas le résidu de l'expérience ou le résultat final de la réflexion : elles sont des illusions, la réalisation des désirs les plus anciens, les plus forts, les plus pressants de l'humanité ; le secret de leur force est la force de ces désirs. Nous le savons déjà : l'impression terrifiante de la détresse infantile avait éveillé le besoin d'être protégé - protégé en étant aimé - besoin auquel le père a satisfait ; la reconnaissance du fait que cette détresse dure toute la vie a fait que l'homme s'est cramponné à un père, à un père cette fois plus puissant…... Et c'est un énorme allègement pour l'âme individuelle de voir les conflits de l'enfance - conflits qui ne sont jamais entièrement résolus - lui être pour ainsi dire enlevés et recevoir une solution acceptée de tous."

Comme dit Freud: «  les conflits de l’enfance » sont à entendre dans les deux sens : conflit de l’enfance de l’humanité et enfance comme échantillon de jeunesse de l’humanité

Enfin

En guise de trace de ce discours dans l’ouverture de votre écoute bienveillante et tolérante à mon égard, je souhaite citer Odon Vallet, Docteur en droit et en sciences des religions, enseignant à la Sorbonne et écrivain : « ….. On peut en quelque sorte analyser et comprendre ses actes et, en cela, le Bouddha était peut-être le premier psychanalyste du monde car il a compris que les actes lorsqu'ils étaient envisagés sous un autre angle, prenaient une autre valeur ».

Je précise simplement que, peut-être, la définition de cette sagesse tant demandée pour l’être humain est simplement d’arriver à mettre ses choix quotidiens dans le décor de la terre, notre globe et dans une culture vielle de 40000 ans, ce que la Laïcité et la psychanalyse partagent pleinement.

Pour ma part, l’intégration croissante de l’anthropologie dans la connaissance de l’homme est un indicateur d’évolution de l’ensemble des disciplines. Et pourquoi, l’intégration des savants sages (avec cette définition) n’entrerait-elle pas dans les procédures des décisions des législateurs et des appareils d’Etat ?

Hassan Makaremi